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Après un parcours PMA pour son 1er enfant, Isabelle (du blog Mademoiselle Meuh !)
a eu un 2ème bébé très rapidement, ce qui a déstabilisé toute la famille …
Avec son mari, ils ont donc attendu avant d’avoir un 3ème enfant.
C’est du faible écart d’âge entre ses 2 grands, de la difficulté, parfois,
pour que chacun trouve sa place dans la fratrie
et de plein d’autres choses qu’elle nous parle aujourd’hui …

 

Bonjour Isabelle. Et si on faisait les présentations ?

Je m’appelle Isabelle et j’ai la trentaine. Je suis prof en LP. J’adore ce que je fais. Je n’ai pas l’impression de me lever pour aller bosser, mais pour m’amuser. J’ai l’immense chance d’aimer mon métier, et aussi d’avoir un job qui m’offre la possibilité d’être souvent avec mes enfants. C’est parfait pour mon équilibre.

J’ai rencontré mon chéri, je n’avais pas encore 17 ans, il en avait 29 (cherchez pas, on a 12 ans d’écart !). Aujourd’hui, nous avons 3 enfants. Très vite, j’ai eu envie d’avoir des enfants. C’est lui qui a temporisé : d’abord les études et ensuite on verra. C’est donc après une licence et une année de séparation pour mon stage de fin d’études à l’étranger que nous nous sommes lancés. J’avais presque 22 ans. Nous avons attendu 22 mois avant d’apprendre ma première grossesse, c’était en 2008. Sa petite sœur est née 22 mois après lui. Après une fausse couche en juillet 2016, nous avons eu l’immense joie de serrer notre troisième bonheur dans nos bras pour fêter nos noces de cuir. Notre petite dernière vient d’avoir 1 an.

 

Que retiens-tu de l’éducation que tu as reçue ?

Enfant, j’ai été élevée par mes grands-parents. Mes parents travaillaient énormément. Avec ma sœur aînée, ils nous laissaient tôt le matin et nous récupéraient tard le soir. Je ne pense pas en avoir souffert. J’ai développé une relation très spéciale avec mes grands-parents. J’ai cependant reçu la même éducation que mes parents, celle de la campagne des années 1960. On obéit, on ne pose pas de questions, et on ne nous en pose pas non plus. Je ne saurais définir le genre de relation que j’avais avec mes parents. Toutefois aujourd’hui, je peux dire que je n’ai pas eu pour habitude d’exprimer mes sentiments, de réfléchir à comment je me sens, à ce dont j’ai envie. Je découvre tout cela depuis peu. C’est dur d’apprendre à s’imposer.

 

Te faisais-tu une idée de la vie de famille que tu essaierais de créer à ton tour ?

Non, je n’avais rien planifié sur l’éducation que je souhaitais donner à mes enfants. J’imaginais plutôt comment je voulais qu’ils soient adultes. Mais les 20 premières années étaient assez floues !

 

Quelle a été ta plus grosse difficulté à l’arrivée de votre 1er enfant ?

Lorsque nous avons commencé à vouloir un bébé, rien ne s’est passé comme dans les livres ou les films. J’ai eu droit à une aménorrhée secondaire, c’est-à-dire qu’à l’arrêt de la pilule, mes règles ne sont pas revenues. 10 mois plus tard, c’est un médicament qui a créé des cycles artificiels. Nous étions à la recherche de cette grossesse. Nous avons parcouru les hôpitaux, les gynécos, les labos … J’étais obsédée. Seule la grossesse m’importait, je n’ai pas pris le temps de réfléchir au « après ». Je voulais un bébé. C’est tout ! Je n’ai pas compris que j’allais donc devenir MAMAN !  Cela a été très compliqué moralement. Et je regrette vraiment qu’un suivi psy ne soit pas proposé dans les suivis PMA. On s’intéresse au corps, mais à aucun moment à la tête. Malheureusement, cela va ensemble.

Notre fils est arrivé avec 3 semaines d’avance, en 1h30. C’était une vraie surprise ! Je pense que j’étais totalement perdue, mais ce petit être était bel et bien là ! C’était réel. C’était tout pour lui, à aucun moment je n’ai pensé que cette arrivée m’avait aussi impactée MOI. Je n’avais donc aucune attente, c’était tout formidable, merveilleux. Mon mari me répète souvent que j’ai beaucoup pleuré en rentrant à la maison : je le regardais et je disais « non, mais il est trop beau quoi ». J’avais ce pour quoi je m’étais battue : un petit bébé. Je sais que j’ai grandi avec mes enfants. C’est aujourd’hui que je me pose les vraies questions. Voilà déjà deux ans que je me demande ce que nous devons faire pour que mon ado en devenir aille bien, se sente bien dans ses baskets, comment l’aider à devenir l’adulte en puissance qu’il est.

 

Dans quel contexte est arrivée ta 2ème grossesse ?

Quand notre fils est né, il était très clair pour moi que je ne voulais plus d’hormones, j’en avais bien assez avalé / injecté. Avant même la naissance, de manière tacite, nous savions que je ne reprendrais aucune contraception. Numéro 2 viendrait quand bon lui semblerait.

Avec l’allaitement et mes ovaires un peu feignants, j’ai eu mon retour de couche 10 mois plus tard. J’ai réussi, pour la première fois, à cibler mes ovulations et donc nous faisions un peu plus attention. Puis un jour, mon chéri me sort « et pourquoi pas ?! ». Sur le moment, j’ai eu peur : on fait une bêtise – il est trop petit – et merde, et si ça marchait ? C’est lorsque mon fils toujours allaité et qui adorait ça s’est mis à bouder le sein que j’ai commencé à avoir la puce à l’oreille. Un peu par hasard, j’ai fait un test. Il était positif. J’étais enceinte de 4 semaines. J’ai tremblé. Je n’y croyais pas. Mon premier test de grossesse positif ! Toutes mes craintes se sont envolées : j’étais enceinte ! Nous allions avoir un bébé. Un que nous avions réussi à faire, tout seuls ! Sans aucune aide. C’était merveilleux !

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Quelles difficultés particulières votre fils a-t’il développées lorsque tu es, de nouveau, tombée enceinte ?

Du haut de ses 14 mois, mon fiston avait donc compris que quelque chose se tramait. Au fur et à mesure de la grossesse, il était de plus en plus attentif à mon ventre. Il venait lui faire des câlins, des bisous. Nous ne nous sommes pas vraiment rendus compte qu’il avait freiné son apprentissage du langage. Je lui parlais beaucoup en anglais, c’était normal que le langage prenne du temps à se mettre en place. Nous ne nous sommes pas vraiment fait de souci.

Sa sœur est née. Il a tout de suite été très attentif à elle. Il voulait tout le temps être avec elle, elle ne pouvait pas pleurer, elle ne pouvait pas ne pas être contente, elle n’avait pas le droit de manquer de quelque chose : il était là, veillait sur elle, venait nous chercher lorsque quelque chose se passait mal selon lui. Un retour de la maternité plutôt compliqué pour nous puisque A. ne savait pas téter et avait perdu plus de 10% de son poids. La mise en place de l’allaitement a été très compliquée (j’ai dû tire-allaité 1 mois, le temps qu’elle sache faire). Nous accordions moins de temps à mon loulou. Il a donc légèrement régressé. Mais c’était normal, non ? Et puis il a été ronchon. Mais c’était normal, sa vie était complètement chamboulée. On a attendu 3 jours. TROIS JOURS avant de se décider à l’emmener chez le médecin. Angine ! Mon chouchou avait une angine depuis 3 jours, et on l’avait laissé attendre. On s’en est beaucoup voulu. Mais il n’a jamais été vraiment désagréable, juste légèrement différent dans son comportement. Il est donc comme cela. Il ne dit rien sur lui, de ses sentiments, de ce qu’il ressent. C’est sa façon de fonctionner, depuis toujours.

On les a élevés comme des jumeaux finalement. Ma fille a été très dégourdie / demandeuse, très vite. Mon fils toujours un peu « à la traîne ». Ils ont donc appris le langage plus ou moins ensemble. Il réclamait toujours du « nananananana » pour du jus de fruits à ses 3 ans.

On est allé voir des orthophonistes, car pour moi il y avait un souci tout de même. Seulement, comme sont faits les tests, on fait des moyennes. Et donc comme il avait beaucoup de vocabulaire (il connaissait la « tenaille » à 5 ans, ce qui est paraît-il exceptionnel), ça « rattrapait » les erreurs de constructions et d’articulations. Alors on nous a renvoyé à la maison, et on est passé pour des extra-terrestres.

Aujourd’hui, on a trouvé une super orthophoniste qui nous a entendus. Il est suivi, et on vérifie s’il n’y a pas un souci de dyslexie. Il a beaucoup progressé, car il avait un retard de lecture de 16 mois.

Aujourd’hui, il accepte un peu plus d’exprimer ses sentiments. Mais c’est encore compliqué de lui faire comprendre qu’il est important.

Aujourd’hui, il parvient à mettre les bons mots sur ses sentiments. Grâce à notre remise en question, à sa volonté de voir une psychologue qui l’a fait avancer.

Aujourd’hui, il reste un enfant sensible qui a les larmes aux bords des yeux très rapidement quand il est touché, mais refuse souvent d’en parler. Il tait également ce qui se passe et qui peut le toucher. J’ai appris dernièrement qu’un camarade d’école l’embêtait. Il a enduré toute l’année, il n’a rien dit.

Aujourd’hui, je dois encore me mettre en colère pour qu’il comprenne qu’il DOIT dire quand quelque chose le chagrine. C’est forcément important, puisque ça le touche.

Sa sœur l’aide beaucoup.

 

Quelle relation ont développé tes deux aînés ?

Ils sont tellement complices, presque fusionnels. Ils sont confidents. Certes, ils se chamaillent, mais c’est logique quand on passe tout son temps ensemble. Ils adorent être tous les deux. En vacances, ils réclament à dormir dans le même lit – ce que nous refusons en temps d’école. Pourquoi ? Parce qu’ils se racontent des histoires jusque très tard dans la nuit !

 

Comment avez-vous préparé vos grands à l’arrivée d’un 3ème bébé ?

Ce sont presque eux qui ont réclamé ce petit troisième. Nous ne leur avons jamais vraiment caché que nous voulions un autre bébé. On tâtait le terrain, histoire de voir leur réaction, commencer à leur expliquer que leur vie risquait de changer. Mais très vite quand même, nous avons dû le leur annoncer. De toute façon, ils savaient. Ils savaient qu’un bébé était là, qu’un bébé viendrait agrandir la famille.

Rapidement, nous les avons donc préparé à cette nouvelle arrivée. Comment ça se passe dans le cœur de papa et maman ? Est-ce que ce nouveau bébé « enlève » de l’amour qu’ont papa et maman pour eux ? Non ! Le cœur s’agrandit. Et on a fait un dessin pour montrer. Et si papa et maman passent plus de temps avec bébé, est-ce que ça veut dire qu’ils nous aiment moins ? Non ! Un bébé a besoin de beaucoup d’attention, car il ne le sait pas encore qu’on l’aime beaucoup, il faut le lui montrer. Et puis, il ne sait pas parler, il ne comprend pas tout, alors il a besoin qu’on passe du temps avec lui. Ce bébé était très attendu.

Je ne voulais pas savoir le sexe. Ma fille, oui. Vraiment. Elle nous a même dit « si c’est un garçon, je fais mes valises » ! Elle avait 6 ans. J’ai campé sur mes positions ; après tout, c’est trop magique de ne pas savoir. Mais quand même. Ne fais-je pas une bêtise, à m’obstiner comme ça ? Alors on énumère tous les points positifs à avoir un petit frère. Et puis je lui dis que je crois bien avoir vu un zizi sur l’écran du moniteur du docteur, mais que je ne suis pas sûre, le docteur n’a rien dit, lui. Et puis c’est elle qui choisit la toute première tenue de bébé : celle si c’est une fille, celle si c’est un garçon. Mon fils choisit la seconde. En secret, je prépare une boîte à grand frère et à grande sœur.

Le jour J, mon intuition avait encore une fois raison : c’est une fille. Quand A. l’a appris, sa réaction fut : « j’ai gagné » !! Mais finalement, quand elle l’a vu, elle était toute perdue. Alors j’ai laissé mon bébé pour ne m’occuper que de mes grands. On a ouvert les boîtes ensemble. Finalement devenir grand frère/grande sœur, on a des cadeaux, c’est plutôt cool.

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Ont-ils facilement accepté leur petite soeur ?

Ils tissent une super relation tous les trois. Nous faisons attention de ne jamais interférer dans ce qu’ils font ensemble, même si c’est parfois borderline ce que font les grands avec leur minus. On pose nos limites en disant « ce n’est pas ton job de faire ça », car ils auraient tendance à trop vouloir faire, pour nous aider, pour être avec elle. On ne leur laisse que les bons moments. Jamais nous ne leur demandons de faire à notre place : « surveille-la pendant que moi … ». NON ! Ce n’est définitivement pas leur job ! Et si c’était la première, on se débrouillerait autrement. Même si ce serait parfois plus facile, on se l’interdit. Les grands sont cependant tellement présents, qu’ils nous aident sans vraiment le vouloir !!

Il est tellement important que chaque enfant ait sa place. Ils sont tous différents, et donc, je ne suis définitivement pas la même maman avec chacun d’eux. L’un a besoin de câlins et d’écoute, l’autre d’actions et de jeux, le troisième d’expérimenter … Ce n’est pas toujours facile, mais qui a dit que ça l’était ?!

 

Quelle maman es-tu aujourd’hui ?

Je ne sais pas quel genre de maman je suis. Une hystérique parfois quand une chaussette traîne au sol, un ours quand on ose s’approcher de trop près ou que l’on blesse ma marmaille, une lionne qui les laisse jouer en veillant au grain de loin, une folle quand on se met à danser et chanter à tue-tête en plein milieu de la cuisine. J’aimerais que mes enfants aient un souvenir de moi comme une maman-câlin, à qui l’on peut se confier, avec qui l’on peut rire et pleurer, qui est organisée (oui, c’est débile !) et qui parvient à tout gérer à peu près, celle vers qui ils se tourneront quand, à leur tour, ils auront une famille « mais comment tu faisais, toi ? ». Quelque part, j’aimerais être leur référente, celle vers qui on peut se tourner, sur qui on peut compter. J’aimerais qu’ils comprennent que la famille est importante. Je suis si heureuse (et sans doute un peu fière !) quand je suis témoin de la relation qu’ont mes enfants. Je veux qu’ils sachent qu’ils comptent pour les autres, et qu’ils peuvent compter sur les autres. J’aimerais qu’ils gardent leur complicité, et j’avoue que l’adolescence me fait peur.

 

Aimeriez-vous agrandir la famille ?

La réponse est un grand OUI ! mais je doute qu’elle ne se réalise un jour. Un petit quatrième nous fait tellement envie, mais l’âge de mon chéri nous freine tout autant. Au milieu de la quarantaine, il a peur. Peur de l’avenir qu’il pourrait offrir à ce petit bébé. Cela dépendra donc de Dame Nature.

 

Que peut-on te souhaiter ?

Des journées de 48heures pour avoir le temps de tout faire ? Ou alors apprendre que rien ne peut être parfait, et qu’il faut vraiment apprendre à lâcher prise. Je ne peux pas être au boulot, fournir un travail de super qualité tout le temps, avoir une maison-musée comme je les appelle, avoir du temps pour moi et faire un sport très régulièrement, cuisiner du fait maison et de l’équilibré pour tout (goûter/petit-dej compris) tout le temps, être toujours là pour mes enfants – tout le temps (et prendre du temps pour moi en même temps ?!), savoir nous accorder des temps de couple … Mon dieu ! Je ne suis pas WonderWoman. Je suis très loin de tout ce que j’énumère (et ce que j’oublie !!). M’accepter telle que je suis. J’en suis loin pourtant.

 

As-tu un sujet qui te tient à cœur et que tu souhaiterais aborder ?

Il y en a tellement !

L’allaitement et les difficultés que l’on peut rencontrer. Pourquoi y a-t-il la guerre entre les biberons et les allaitantes ? Pourquoi justifier son choix, quel qu’il soit ?

La manie de comparer les enfants entre eux. Mon dieu ! Laissons-les ! Nous, adultes, sommes tous différents, pourquoi ne pas accepter qu’eux aussi ?!

Les vraies clés pour aider nos enfants quand ils grandissent. Je suis perdue face à mon 9 ans. Que faire, que dire, comment l’aider pour qu’il apprenne à prendre les bonnes décisions pour lui ? L’aider à affronter cet énorme changement qui s’annonce pour lui : l’adolescence ? Comment lui faire comprendre qu’il DOIT nous dire quand quelque chose ne va pas, que nous sommes vraiment là pour l’écouter, et que NON, ce n’est pas rien, c’est LUI ?

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© Photos : Isabelle – Mademoiselle Meuh 

 

Merci beaucoup, Isabelle, d’avoir proposé de témoigner sur le blog ! Tes questions, inquiétudes, interrogations parlent à beaucoup, j’imagine (moi la première – est-ce parce que nos enfants ont le même écart ? 😉 ).

Quant à vous qui nous lisez, je vous souhaite un excellent week-end, de très bonnes vacances d’automne et je vous retrouverai avec plaisir à la rentrée ! 🙂

Je vous embrasse.

Céline.