Que ce soit à l’occasion d’un décès ou pour répondre à leur curiosité,
il vient toujours un moment où nous en venons à aborder la mort avec nos enfants …

Selon leur âge et leur niveau de compréhension, le contexte émotionnel dans lequel ces questions sont abordées, notre volonté, ou non, de transparence par rapport à un sujet sensible et qui nous bouleverse en tant qu’adultes, et enfin selon les croyances propres à chacun, nous n’emploierons pas les mêmes mots et ne ferons pas nécessairement passer le même message ;  le but étant évidemment toujours d’apporter suffisamment de réponses à nos enfants pour apaiser leurs craintes.

Les contextes dans lesquels la mort est venue s’inviter dans nos discussions :

Chez nous, ce sujet a particulièrement questionné les enfants à 3 reprises :

  • Lors du décès de mon grand-père, lorsque Loulou avait 2 ans et Chaton 3 mois
  • Pendant la période des grandes questions sur la mort, quand Loulou avait 3 ans et demi / 4 ans, (Chaton, du haut de ses 1 an et demi / 2 ans) n’y a guère prêté attention
  • Lorsque notre poisson rouge nous a quittés cet été, Loulou 4 ans, Chaton 2 ans

Si les enjeux affectifs dans ces différents contextes n’étaient pas les mêmes, si les questions n’étaient pas formulées de la même manière et si nos réponses ont probablement varié, nous avons tout de même, à chaque fois, essayé, en tous cas sur le fond, de tenir le même discours.

 

Voici comment nous avons abordé la mort avec les enfants :

  • Choisir un moment de calme et d’apaisement pour annoncer la mort de quelqu’un : 

Lors du décès de mon grand-père, j’ai attendu une demi-journée avant d’en parler à Loulou. Ce délai m’a permis, d’une part de prendre un peu de recul par rapport à mes émotions et d’autre part, de réfléchir aux mots que j’allais employer pour la lui annoncer.

Pour être sûre d’avoir son attention, j’ai choisi un moment où je le sentais réceptif (calme, reposé …) et j’ai commencé par lui dire qu’il fallait que je lui parle de quelque chose d’important.

 

  • Expliquer que mourir est naturel :

Il n’est pas toujours évident pour nous, adultes, de l’admettre (encore moins de l’accepter), alors j’imagine que, pour des enfants, l’idée que tout s’arrête est un concept particulièrement difficile à comprendre. Nous essayons donc d’expliquer, avec des mots simples que la mort n’est pas l’opposé de la vie, mais qu’elle en fait, tout simplement, partie.

En nous basant sur des choses observables chaque jour, nous essayons de leur faire comprendre que tout ce qui est vivant meurt (d’un bouquet de fleurs qui se fane à la mouche qui ne vole plus). Et nous précisons que c’est (malheureusement) inévitable.

 

  • Etre factuel :

J’ai donc essayé d’aborder ça avec le plus de naturel possible. Et, dans un souci d’explications et de respect de mes enfants (que je considère comme des personnes à part entière, et donc capables de tout comprendre), il me semblait évident de ne rien leur dissimuler. J’ai donc expliqué les faits simplement mais clairement.

Il était important pour moi de ne pas utiliser de vocabulaire imagé (s’en aller, aller au ciel, partir pour un grand voyage, nous quitter, perdre quelqu’un …)  : du haut de ses 2 ans (et ce serait encore le cas aujourd’hui), il n’aurait pas compris ces métaphores. Elles auraient donc été plus angoissantes que rassurantes pour lui car source de questions : elles auraient induit, par exemple, que lorsqu’on part en voyage, on peut ne pas revenir, quand peut être quitté du jour au lendemain, etc. Souvent, on utilise un vocabulaire imagé, édulcoré pour préserver les enfants, mais il brouille notre message et peut rendre les choses angoissantes pour eux.

À l’inverse, je pense qu’être factuel est rassurant : Des mots comme « Son coeur ne bat plus. Il ne respire plus / Son cerveau avait arrêté de fonctionner / Sa maladie s’appelait un cancer … » permettent à l’enfant de comprendre la mort.

 

  • Associer la mort à un contexte : 

J’ai aussi tenu à ne pas simplement dire à mes enfants que leur arrière grand-père était malade. Être malade est tellement fréquent chez les jeunes enfants que ça les aurait angoissé lors de leurs prochains rhumes, angines, etc.

Préciser que l’on meurt généralement lorsqu’on très vieux ou qu’on a une maladie très GRAVE. Je mourrai un jour aussi mais normalement quand je serai très vieille et que tu seras vieux toi aussi.

J’ai aussi abordé le cas des accidents graves : le fait d’insister sur le fait que l’on peut mourir d’accidents aussi m’a semblé important pour les sensibiliser au fait que certaines choses peuvent être graves et avoir des conséquences et leur faire prendre consciences des dangers. (Traverser la route sans regarder, aller trop près d’une route passante, etc. peut avoir des répercussions). C’est pour cela qu’il faut être particulièrement vigilant.

 

  • Ne pas chercher à cacher mes émotions :

Je me suis sentie à l’aise pour montrer que la mort de quelqu’un peut me rendre triste : il est normal de ressentir des émotions lorsque l’on perd quelqu’un. Je n’ai donc pas cherché à cacher, dissimuler ni les faits ni mon état émotionnel. Je ne me souviens plus des mots exacts que j’avais employé avec Loulou lors du décès de mon grand-père mais, en gros, j’avais dit : « Tu te souviens que Grand-Papy était très malade, qu’il avait une maladie très grave. Et bien, Maman est triste ce matin car il est mort. Je l’aimais beaucoup et je ne pourrai plus jamais le voir donc ça me rend triste. J’ai beaucoup de chagrin et c’est pour ça que je pleure. »

 

  • Donner des détails en suivant le rythme de leurs questions :

À chaque fois que le sujet de la mort est apparu, j’ai essayé de répondre aux questions des enfants le plus simplement possible, sans tabou. J’ai ainsi parlé du fait que le corps ne fonctionnait plus, ne vivait plus, qu’il était enterré / incinéré, etc.

Mais je n’ai jamais devancé leurs questions. Je n’ai pas voulu leur donner de détails qu’ils ne demandaient pas. L’essentiel pour moi était de suivre leur rythme pour pouvoir les rassurer.

 

  • Les laisser assister aux funérailles s’ils le souhaitent :

Je leur ai permis d’assister aux funérailles de mon grand père. Je me souviens encore du décès de mon arrière grand père lorsque j’avais 5 ans et du fait qu’on avait refusé que j’aille à son enterrement. Je crois me souvenir qu’on m’avait dit que j’étais trop petite et on avait voulu me préserver, mais je me souviens avoir eu la sensation d’être mise à l’écart de quelque chose d’important. J’ai longtemps été traumatisée par la mort avec de vraies angoisses. Je ne sais pas si c’est lié ou non. Mais il me semble naturel que les enfants puissent prendre part à un événement familial même lorsque celui-ci est triste.

 

La réaction des enfants :

Lors du décès de mon grand-père, Loulou a immédiatement compris les choses (enfin, ce qu’il était à même de comprendre du haut de ses 2 ans). Il m’a posé quelques questions, a verbalisé ce qui s’était passé et y est revenu plusieurs fois, avec naturel : « Grand Papy est mort ». 

Mais je me souviens qu’il a eu une phase d’angoisses de l’hôpital quelques temps après. Mon grand-père avait été longtemps hospitalisé avant de mourir et, dans son esprit, l’hôpital était associé à la mort (et non au fait de soigner des gens). Je pense, avec le recul, que les mots que j’avais employés pour contextualiser son décès n’avait pas été optimums. J’avais alors précisé qu’il avait été longtemps à l’hôpital car il était gravement malade … Si c’était à refaire, je ne lierais pas l’hôpital à l’annonce d’un décès. Lorsque son frère a été hospitalisé plusieurs jours pour bronchiolite quelques mois plus tard, j’ai senti qu’il avait été d’autant plus inquiet.

 

Lorsque notre poisson rouge est mort cet été, les enfants nous ont demandé où il était maintenant. Étant donné qu’il n’y avait aucun lien affectif avec notre poisson, nous leur avons dit que nous l’avions tout simplement jeté à la poubelle, de la même manière qu’on mettait les fleurs à la poubelle lorsqu’elles étaient fanées. Ça ne les a pas inquiété. Enterrer le poisson rouge aurait été, il me semble, plus angoissant pour eux car ils auraient tout le temps cherché à savoir si le poisson était encore là en repassant sur notre terrasse. Alors qu’aujourd’hui, ils n’y pensent plus.

 

Les enfants ont une vraie capacité de résilience, une légèreté et passent vite « à autre chose » s’ils sentent que le sujet n’est pas tabou pour nous.

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Pour aller plus loin :

Vous savez comme j’aime les livres pour enfants et à quel point je pense qu’ils peuvent permettre d’accompagner les enfants en verbalisant les choses d’une manière différente de celle que nous aurions utilisée. Quelques livres existent pour aborder ce sujet délicat avec les enfants. J’ai notamment entendu parler du livre « Mes p’tits pourquoi : La mort » qui semble très bien fait pour ceux qui, comme moi, cherchent à expliquer la mort de manière factuelle, appeler un chat un chat et ne pas cacher certaines choses de peur de traumatiser leurs enfants. Je pense m’en procurer plusieurs et vous faire un petit récap de ceux qui m’ont plu. Est-ce que ça vous plairait ? Avez-vous des suggestions de petits livres à me faire ?

Évidemment, chacun « gère » la mort comme il le souhaite, comme il le peut. Chaque décès est différent et j’imagine que les choses seraient encore différentes aujourd’hui, les enfants étant plus grands. L’idée de ce billet n’est pas de porter un jugement ni de vous dire comment faire, mais, comme d’habitude, de partager avec vous et de confronter nos points de vue pour nous enrichir mutuellement.

Alors, comment avez-vous procédé, chez vous, pour répondre aux questions de vos enfants sur la mort ? À travers nos échanges (j’espère que vous interviendrez pour me laisser un petit mot), j’espère pouvoir recueillir quelques pistes supplémentaires.

Bonne journée à vous.

À très vite.

Céline.